samedi 4 mai 2024

Mode associatif : après les magistrats Les magistrates se mobilisent

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Khadija Skalli

  L’Association marocaine des femmes juges prépare actuellement un plaidoyer qu’elle soumettra à la Cour suprême. Les magistrates exigent plus d’équité et visent surtout les postes de procureur général et la présidence de la Chambre criminelle.

 

  Les magistrates veulent une meilleure représentativité au sein du corps judiciaire. Elles veulent surtout accéder aux postes à haute responsabilité, actuellement réservés exclusivement à la gent masculine. L’Association marocaine des femmes juges se mobilise pour atteindre cet objectif. Elle prépare actuellement un plaidoyer qu’elle soumettra prochainement à la Cour suprême.

 

 «La présence des femmes dans des postes de décision du corps judiciaire demeure très faible. Il y a seulement une ou deux femmes juges d’instruction.  Les femmes demeurent absentes aux  postes de haut rang de ce secteur. A titre d’exemple, aucune femme n’occupe les fonctions de procureur général ni la présidence des juridictions criminelles », déplore Aïcha Naciri, présidente de l’association des femmes juges, également procureur du roi du tribunal de 1re instance civil d’Anfa.

 

   L’association compte également organiser des séminaires pour sensibiliser l’opinion publique et les  décideurs à leur cause. Fraîchement créée en octobre 2011, l’ONG fait déjà parler d’elle. Sa présidente, une militante associative chevronnée, s’est forgé une réputation de femme de caractère dans le milieu judiciaire. « Après mes études supérieures en droit, j’ai été nommée juge au tribunal de 1ère instance de Ben M’Sik- Sidi Othmane. C’était une expérience riche. A cette époque, la femme juge ne présidait pas les audiences du tribunal de famille. J’étais la seule à l’exiger », confie-t-elle. Aussi, l’association s’est fixé des objectifs ambitieux.

  Défendre les intérêts et les droits des femmes juges en plaidant pour plus d’équité, renforcer les liens de solidarité et de coopération entre les femmes magistrates des différentes régions, organiser des activités culturelles et sociales, créer un fonds de solidarité pour les magistrates… L’ONG ambitionne également de s’ouvrir sur les autres associations notamment celles défendant les intérêts des magistrats. « Nous voulons créer une certaine coopération entre les associations des magistrats, qu’elles soient féminines ou masculines. Nous voulons également apporter notre appui aux ONG œuvrant dans le domaine de la femme ou de l’enfance. Nous pouvons donner des conseils juridiques aux femmes battues par exemple », ajoute Aïcha Naciri, une militante associative chevronnée, qui a des dizaines d’années d’expérience sur le terrain.

 

Les magistrates en mode associatif

  Au lendemain de la promulgation de la Constitution, les magistrats investissent la scène associative. L’article 111 de la Constitution leur accorde ce droit. «Les magistrats jouissent de la liberté d’expression, en compatibilité avec leur devoir de réserve et l’éthique judiciaire. Ils peuvent appartenir à des associations ou créer des associations professionnelles, dans le respect des devoirs d’impartialité et d’indépendance et dans les conditions prévues par la loi. Ils ne peuvent adhérer à des partis politiques ou à des organisations syndicales », stipule l’article 111 de la Constitution.

 

   Les magistrats sortent ainsi de leur mutisme et débattent de leurs maux. Auparavant, pour participer à une action associative ou parler à la presse,  une autorisation du ministère de tutelle était requise. Par peur de se voir refuser une telle demande, l’autocensure s’est installée pour devenir, petit à petit, la règle. Aïcha Naciri était l’une de ces rares magistrates courageuses qui ont su imposer leur vision des choses. « Les magistrats ont un rôle important à jouer dans le domaine social. C’était ma vision et elle est toujours d’actualité. C’est pourquoi j’ai participé à plusieurs actions associatives », se félicite-t-elle.

 

   Malgré ses maigres moyens financiers, l’association compte ouvrir des bureaux régionaux pour plus de proximité avec la population. « Les femmes magistrates veulent s’investir dans l’action associative. Les demandes d’adhésion à l’association affluent de toutes les régions. Nous nous penchons actuellement sur la création de bureaux régionaux », poursuit  Aïcha Naciri, qui vient d’être nommée membre de la Commission régionale de Casablanca du CNDH (Conseil national des droits de l’Homme). Prochaine action de l’ONG prévue en mars prochain : l’organisation d’une série d’activités à l’occasion de la Journée mondiale de la femme. L’événement se tiendra en partenariat avec la Widadia Hassania des juges.

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