dimanche 28 avril 2024

Musique du futur: l’IA entre « valorisation » et « déshumanisation » des œuvres musicales

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L’intelligence artificielle constitue « un outil à double tranchant » en matière de création musicale, ont souligné, samedi à Rabat, des experts des domaines de la musique et des droits d’auteur.

Sujet d’actualité, l’intelligence artificielle (IA) n’a pas manqué de toucher la sphère musicale, ont relevé les intervenants à une conférence sur « L’avenir de la création musicale à l’ère de l’IA », organisée dans le cadre de la 10ème édition du Festival Visa For Music, en partenariat avec la Confédération internationale des sociétés d’auteurs et compositeurs (CISAC), le Bureau marocain des droits d’auteurs (BMDA) et la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM).

Les panélistes venus du Nigeria, du Rwanda, de l’Afrique du Sud et de la France ont exprimé des avis mitigés entre célébration d’une nouvelle technologie qui « donne un coup de main aux artistes » dans leurs créations, et appréhension vis-à-vis de la « déshumanisation des œuvres et du processus de la création artistique musicale« .

Dans leurs interventions, les experts présents ont signalé que l’IA, une technologie qui se nourrit principalement de créations et librairies musicales accessibles en ligne, pose beaucoup de problèmes au processus de création musicale, notamment en matière d’exploitation de données (data mining) qui fait que « tout utilisateur peut s’autoproclamer artiste et en être rémunéré« .

« L’IA est un sujet qui fait trembler certains, mais qui est pourtant un monde de challenges, de défis et d’opportunités« , a indiqué Habib Achour, directeur de développement international de la SACEM en France, dans une déclaration à la MAP.

« Nous sommes là pour démystifier cette technologie et montrer comment elle peut être un atout autant qu’une menace pour la scène musicale dans le continent africain et le monde entier », a-t-il ajouté.

Pour sa part, Jotam Matariro, directeur de l’Association des compositeurs, auteurs et éditeurs en Afrique du Sud (CAPASSO), qui compte sa troisième participation à Visa For Music, a indiqué que « lorsque la diffusion digitale (streaming) a surgi, le continent africain a été laissé pour compte, et nous venons de nous rattraper« . « On se doit de mettre à jour nos lois de droits d’auteur et de nous trouver des partenaires pour la promotion, la protection et la sensibilisation des artistes musiciens africains sur l’utilisation de cette technologie« , a-t-il poursuivi.

La question se pose alors du public ou du consommateur, qui peut « profiter de créations musicales, à base d’IA, assez singulières et originales, un terme jusqu’alors réservé aux êtres humains« , mais encore aux aspirants de la création musicale, qui y trouveront une « alternative pour l’amélioration du rapport de coût/qualité de la production« .

Les intervenants à ce débat ont proposé des solutions pour « travailler avec et non contre l’IA« , notamment la transformation du cadre légal sur le sujet par l’instauration d’un calcul du pourcentage minimal de légalité, la compensation pour risque potentiel pour les professionnels de la musique et la redéfinition de la notion de copyright du musicien ou artiste.

En dernier lieu, les panélistes ont rappelé que la créativité est un processus humain, nourri d’expériences et de compétences personnelles des professionnels de la musique, et qu’il reste “indispensable du point de vue éthique par rapport à la disparition d’emplois et de chaînes de valeurs humaines”.

Organisée du 22 au 25 novembre sous le Haut patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, la 10ème édition du Festival Visa For Music propose plus de 60 concerts musicaux inédits, en plus de l’organisation de 15 rencontres, conférences et workshops.

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