samedi 18 mai 2024

Immigration : un projet de loi sous haute tension au Parlement

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Plusieurs fois reporté, décrié à gauche comme à droite pour des raisons opposées, un projet de loi sur l’immigration sera examiné à partir de lundi en France, avec des débats inflammables en perspective. 

Le gouvernement mise sur deux aspects: un volet répressif pour «être dur avec les étrangers délinquants», dont il veut faciliter l’expulsion, alors que le taux d’exécution des obligations de quitter le territoire français n’était que de 6,9% au premier semestre 2022. Et un volet intégration, en premier lieu pour «les gens qui travaillent», comme l’a souligné le ministre français de l’Intérieur Gérald Darmanin.

L’arrivée massive de migrants sur l’île italienne de Lampedusa en septembre, puis l’assassinat d’un professeur par un jeune Russe, islamiste radicalisé, en octobre dans le nord de la France, ont renforcé la conviction du gouvernement que ce texte est la bonne formule «pour la sécurité des Français», selon le ministère de l’Intérieur.

La France compte 5,1 millions d’étrangers en situation régulière, soit 7,6% de la population. Elle accueille plus d’un demi-million de réfugiés. Les autorités estiment qu’il y aurait de 600 000 à 700 000 clandestins.

Le texte «s’inscrit dans l’évolution des législations partout en Europe, qui tendent à renforcer les outils pour mieux maîtriser les flux migratoires», analyse auprès de l’AFP Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII).

Il sera examiné par le Sénat, puis par l’Assemblée nationale, alors que le paysage politique français est marqué par une montée en puissance du parti d’extrême droite Rassemblement national (RN). Selon un sondage publié fin octobre, sa candidate Marine Le Pen dépasserait la barre des 30% si le premier tour de la présidentielle était organisé maintenant, soit au moins sept points de plus que lors du premier tour de 2022.

Motion de censure

A gauche en revanche, “on peut en être sûr, personne ne votera ce texte régressif ni à l’Assemblée ni au Sénat”, balaye le sénateur communiste Ian Brossat. Empêcher la suppression de l’article 3 serait tout de même un succès face à la droite, rarement mise en minorité à la Haute Assemblée.

A l’Assemblée, l’aile gauche de la macronie, très favorable aux mesures d’intégration, aimerait pouvoir revenir au texte initial du gouvernement si le Sénat n’adopte pas sa propre version, plus ferme.

Les Républicains, eux, veulent modifier la Constitution notamment pour élargir le spectre du référendum à la question migratoire. Leurs textes seront examinés le 7 décembre à l’Assemblée et le 12 au Sénat.

Sur le projet de Gérald Darmanin, ils ne cessent de brandir la menace d’une motion de censure, se disant prêts à renverser le gouvernement en cas de 49.3. Rien n’assure néanmoins qu’ils réuniraient suffisamment de votes : le patron des socialistes Olivier Faure a déjà prévenu que son groupe ne la voterait pas.

“Les Républicains nous ont menacés pendant des semaines”, glisse le président (Renaissance) de la commission des Lois de l’Assemblée, Sacha Houlié. “Mais le pistolet qu’ils pointent vers nous, c’est un pistolet à bouchon”.

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