dimanche 3 décembre 2023

Vote test pour l’avortement dans l’Ohio, un an avant la présidentielle américaine

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L’État de l’Ohio, dans le Midwest américain, est appelé à se prononcer mardi sur l’inscription ou non dans sa Constitution du droit à l’avortement, un scrutin test qui devrait permettre aux deux camps d’ajuster leur stratégie nationale sur cette question centrale avant la présidentielle de 2024. 

Il y a presque un an et demi, la Cour suprême des États-Unis, dominée par les conservateurs, a cassé son arrêt «Roe v. Wade», qui garantissait depuis un demi-siècle le droit fédéral des Américaines à interrompre leur grossesse.

La question est donc revenue aux États. Plusieurs se sont empressés de restreindre voire d’interdire l’IVG, d’autres ont au contraire renforcé sa protection.

Dans l’Ohio, une loi est entrée en vigueur, interdisant la plupart des avortements – même en cas de viol ou d’inceste – dès qu’un battement de cœur peut être détecté. C’est-à-dire vers six semaines, souvent avant même qu’une femme ait connaissance de sa grossesse.

Ce texte est actuellement en suspens en raison d’une bataille juridique.

En attendant une décision, il est encore possible d’avorter dans l’Ohio jusqu’à environ 22 semaines de grossesse. Mais pendant le court temps durant lequel la loi ultra restrictive a été en vigueur, une fillette de 10 ans enceinte après un viol a dû se rendre dans l’État voisin de l’Indiana pour avorter, une affaire qui avait choqué dans tout le pays.

Décisions médicales 

Le scrutin se clôt mardi soir, mais les électeurs de l’Ohio votent par anticipation depuis des semaines déjà.

Il s’agit de dire «oui» ou «non» à un amendement à la Constitution locale soumis par une initiative citoyenne pro-avortement. Ce dernier prévoit que tout individu ait «le droit de prendre et d’appliquer ses propres décisions» en matière notamment d’avortement, de contraception et de traitement lié à la fertilité ou aux fausses couches.

Le texte précise toutefois que l’avortement peut être interdit une fois que le fœtus est considéré comme pouvant être viable en dehors de l’utérus. Mais un tel avortement ne peut être prohibé si le médecin juge que la vie ou la santé de la femme est en danger, poursuit l’amendement proposé.

Plusieurs autres votes sur l’avortement se sont soldés l’an dernier par la victoire du camp pro-avortement, comme dans le Kansas, la surprise des républicains, qui ont dû remettre en cause leur message.

Le scrutin de l’Ohio est donc l’occasion pour les deux camps d’affiner ou de recadrer leur stratégie, avec la présidentielle de 2024 en ligne de mire.

Les défenseurs d’«Issue 1» – le nom donné à l’amendement – ont axé leur campagne sur la nécessité d’empêcher toute interférence de l’État dans des décisions «médicales personnelles».

Et pour donner encore plus de poids à ce discours, la coalition Ohioans United for Reproductive Rights a, dans l’un de ses spots de campagne, fait appel à un religieux.

«En tant que pasteur, j’ai conseillé des familles sur les décisions personnelles les plus importantes, même l’avortement. L’avortement est une décision familiale privée. L’État doit rester en dehors de la prise de décision familiale», dit le révérend Tim Ahrens.

Les opposants à l’avortement, comme la coalition Protect Women Ohio, qualifient l’amendement d’«extrême».

«Je sais que les habitants de l’Ohio sont divisés sur la question de l’avortement. Mais que vous soyez pro-vie ou pro-choix, l’Issue 1 ne convient tout simplement pas à l’Ohio», a dit dans une vidéo le gouverneur républicain de l’État, Mike DeWine.

«L’Issue 1 va tout simplement trop loin» parce qu’il autoriserait les avortements «à n’importe quel moment pendant la grossesse», a renchéri son épouse dans le même clip – une affirmation démentie par le camp adverse et dénoncée comme de la désinformation.

Le scrutin de l’Ohio sera d’autant plus suivi que cet État a longtemps été considéré comme un «swing state» – l’un de ces États cruciaux, car oscillant entre démocrates et républicains et susceptibles de faire pencher la balance – avant de porter son choix deux fois d’affilée, en 2016 et 2020, sur Donald Trump, à nouveau candidat pour 2024.

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