vendredi 21 juin 2024

Ramaphosa, un Président en temps de troubles

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Syndicaliste puis homme d’affaires à succès avant d’être élu Président de l’Afrique du Sud en 2019, Cyril Ramaphosa a décroché vendredi un deuxième mandat à la tête d’un pays qui s’engouffre dans des défis économiques et sociaux colossaux.

Avec un taux de chômage qui frôle 33%, une inflation galopante, une dette insoutenable et des inégalités croissantes, les Sud-africains s’attendent à ce M. Ramaphosa apporte le changement tant souhaité et de trouver des solutions aux maux dont ils souffrent.

À présent, tous les indicateurs sont dans le rouge. Dans son dernier rapport, le Fonds monétaire international (FMI) a revu à la baisse les prévisions de croissance du PIB du pays pour 2024 à 0,9 %, au lieu de 1,8 % annoncée en octobre dernier.

Le chef de l’État sera appelé à renforcer la lutte contre la corruption, un phénomène qui continue de ronger les institutions publiques, portant un coup dur à l’image du pays, notamment auprès des investisseurs et des partenaires étrangers.

La criminalité est un autre fléau que M. Ramaphosa est appelé à combattre. Les derniers chiffres de la police sur la criminalité dans la Nation arc-en-ciel font froid au dos, avec 7.710 personnes assassinées au dernier trimestre 2023, une situation qui pèse lourdement sur la qualité de vie des Sud-africains et représente une menace sérieuse pour l’économie du pays.

Né en 1952 à Soweto, Ramaphosa s’est illustré dès son jeune âge dans le militantisme étudiant dans les années 1970 contre le régime ségrégationniste blanc de l’apartheid. Arrêté en 1974, il passe onze mois à l’isolement en cellule.

Diplômé en droit, il se tourne vers le syndicalisme et fonde en 1982 le Syndicat national des mineurs (NUM) qui devient une machine de guerre rassemblant près de 300.000 membres.

Son implication dans la grande grève du secteur minier en 1987, qui fait vaciller le régime de l’apartheid, lui vaut d’être remarqué par les dirigeants de l’ANC.

À sa sortie de prison en 1990, Nelson Mandela fait du jeune syndicaliste l’un de ceux qui vont négocier la transition politique avec le pouvoir en place. Il figurait parmi « les plus doués de la nouvelle génération », écrit « Madiba » dans ses mémoires.

Après son échec pour succéder à Nelson Mandela à la tête de l’ANC en 1999, Ramaphosa coupe les ponts avec son propre parti pour se lancer dans les affaires.

À la tête de la holding Shanduka, il fait fortune en siégeant aux conseils d’administration de la Standard Bank, en présidant celui de l’opérateur de téléphonie MTN ou en rachetant toutes les licences des restaurants McDonald’s du pays, bénéficiant de la politique d’émancipation économique des Noirs (BEE).

Mais son divorce avec la politique n’est que de courte durée. Vice-président de l’ANC en 2012, vice-président du pays en 2014, Ramaphosa est de retour avec l’ambition de diriger le pays. Succédant à l’ex-président Jacob Zuma, contraint de démissionner après une série de scandales de corruption et de «capture de l’État», Cyril Ramaphosa s’est engagé à débarrasser la Nation arc-en-ciel des maux qui la rongent, à leur tête la corruption.

Cependant, ce sentiment d’optimisme s’est vite dissipé avec la succession de scandales de corruption qui ont terni l’image de son gouvernement, le coup de grâce à cette nouvelle ère ayant été donné par l’affaire de la ferme «Phala Phala» qui a complétement décrédibilisé le chef de l’État, ainsi que son parti au pouvoir.

Ramaphosa a été accusé de ne pas avoir signalé le cambriolage dans sa ferme dans la province du Limpopo d’une importante somme d’argent en devise, contrevenant ainsi à la loi sur la prévention du crime organisé.

Faisant de la lutte contre la corruption son cheval de bataille, le protégé de Nelson Mandela est tombé dans la disgrâce après qu’une Commission parlementaire indépendante a publié un rapport confirmant des accusations criminelles portées contre lui.

Cette affaire a même failli contraindre le chef de l’État à démissionner, mais les députés de l’ANC, majoritaires au Parlement, ont accouru à son chevet en rejetant le rapport de la Commission d’enquête.

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