jeudi 18 avril 2024

Chine: le militant Chen met Pékin au défi de prouver qu’il n’a pas ordonné sa résidence surveillée

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Lareleve.ma-AFP

 

 

  Le militant Chen Guangcheng a mis mercredi le gouvernement chinois au défi de prouver qu’il n’était pas responsable de son assignation à résidence extrajudiciaire dans son village et de punir les cadres locaux qui ont fait de sa maison une véritable prison pendant près de deux ans.

 

  « Le gouvernement central doit prouver qu’il n’est pas derrière mon traitement dans (la province du) Shandong » (est), a déclaré à l’AFP par téléphone depuis son lit d’hôpital le dissident, blessé au cours de son évasion fin avril et qui a ensuite trouvé refuge pendant six jours à l’ambassade des Etats-Unis à Pékin.

 

  Aux autorités, « j’ai dit que si elles n’enquêtaient pas, tout le monde penserait qu’elles ont ordonné » la mesure de résidence surveillée, a ajouté l’avocat aveugle.

 

  A l’inverse, si des représentants du pouvoir central « vont sur le terrain et punissent ceux du Shandong, alors les gens penseront que ce se sont les responsables du Shandong qui sont à l’origine » de cette mesure, a-t-il ajouté.

 

  Des sinologues ont récemment fait valoir que Pékin pourrait effectivement sauver la face en rejetant la responsabilité de cette embarrassante affaire sur les autorités du Shandong.

 

  Champion de la lutte contre les avortements et stérilisations forcés en Chine, Chen Guangcheng avait déjà purgé une peine de quatre ans de prison entre 2006 et 2010 avant d’être placé de facto en résidence surveillée, une mesure prise sans décision de justice.

 

  Des dizaines, voire une centaine de gardes, entouraient sa maison ou les abords de son village de Dongshigu 24 heures sur 24, l’empêchant ainsi que sa femme de quitter leur domicile et de recevoir des visiteurs chez eux.

 

  Aucune justification juridique n’a jamais été fournie par les autorités du Shandong pour cette mesure.

 

« Durant deux ans ils m’ont traité brutalement, venant à la maison pour nous menacer et nous battre », a déclaré Chen Guangcheng.

 

  « Pendant deux ans, ils ne m’ont pas permis de communiquer avec le monde extérieur. Je n’ai pu rencontrer d’amis, ils ne m’ont pas laissé lire de journaux, ils ont même confisqué notre télévision et notre radio », a précisé le militant des droits civiques.

 

  Chen avait l’an dernier expliqué ces mauvais traitements dans une vidéo qui lui avait valu encore plus de brutalités.

 

  Ses amis et les journalistes qui ont tenté depuis près de deux ans d’approcher de sa maison ont tous été repoussés sans ménagement par des hommes de main, et certains même battus.

 

  Le refuge qu’a trouvé Chen fin avril, après son évasion du Shandong, à l’ambassade des Etats-Unis, a été au centre d’une crise diplomatique entre Pékin et Washington la semaine dernière.

 

  A l’issue de cet imbroglio qui a plombé une visite à Pékin de la secrétaire d’Etat américaine Hillary Clinton, le gouvernement américain a promis d’accorder rapidement à Chen un visa pour aller étudier aux Etats-Unis. Pékin avait auparavant annoncé que le militant pouvait faire une demande de passeport pour quitter son pays.

 

  Chen, qui a déclaré mardi avoir reçu la visite de responsables officiels lui assurant qu’ils allaient engager des procédures lui permettant de quitter la Chine, attendait toujours mercredi son passeport chinois à l’hôpital Chaoyang de Pékin.

 

  Il y a été admis il y a une semaine et, selon ses dires, se retrouve une nouvelle fois quasiment sous le régime de la résidence surveillée: il ne peut recevoir de visiteurs ni quitter l’hôpital, sa femme et ses deux enfants non plus.

 

  La presse et ses sympathisants sont tenus à distance de l’établissement par de nombreux policiers en civil et en uniforme.

 

  Dans un éditorial mercredi, le quotidien officiel Global Times estimait que l’affaire Chen était « utilisée » par « certaines forces politiques extérieures » qui souhaitent « attirer l’attention du monde entier » et « en faire une question aussi grave que les événements de Libye ou de Syrie ».

 

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