dimanche 16 juin 2024

30 ans après l’apartheid, l’eau et l’électricité demeurent un luxe pour de nombreux Sud-africains

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L’Afrique du Sud, qui se prépare à des élections générales décisives vers la fin du mois, est confrontée à un paradoxe frappant : trois décennies après la fin du régime ségrégationniste de l’apartheid, l’accès à des services de base tels que l’eau et l’électricité reste encore un luxe pour des millions de Sud-africains.

Alors que les zones rurales et les townships sont particulièrement touchés par la pénurie d’eau courante et les délestages électriques, avec des infrastructures tombées en ruines, les grands centres urbains ne sont pas, non plus, à l’abri des rationnements réguliers qui visent à apprivoiser une demande qui dépasse largement l’offre.

Minée par des années de gestion désastreuse et de corruption galopante sous la direction du Congrès national africain (ANC), parti au pouvoir depuis l’avènement de la démocratie en 1994, l’Afrique du Sud voit ses infrastructures de base s’écrouler inexorablement.

Dans ce contexte, l’exaspération des communautés locales ne cesse de croitre, se manifestant par des mouvements de protestation organisés de manière systématique contre l’incurie des services publics.

Les images véhiculées sur les réseaux sociaux sur les violences accompagnant les interventions policières pour disperser les foules des émeutiers évoquent les années sombres de l’apartheid.

«L’ANC nous a laissé tomber !», s’indignent les résidents de Soweto, quartier emblématique de Johannesburg qui a joué un rôle crucial dans la lutte contre l’apartheid. Privée d’eau et d’électricité depuis des mois, la communauté pointe du doigt les promesses sans lendemain du parti historique.

Durant les derniers mois, les pénuries d’eau ont atteint des niveaux critiques, non seulement dans les quartiers populaires, mais à l’échelle nationale. Cette situation est attribuée principalement au sous-investissement dans les infrastructures hydrauliques, aux délestages électriques, ainsi qu’à la sécheresse qui sévit dans plusieurs régions du pays.

Les autorités sud-africaines invoquent souvent des travaux de réparation des canalisations vieillissantes qui s’éclatent de manière très fréquente, causant des interruptions qui frappent de plein fouet les ménages et les entreprises.

Quant à la crise interminable de l’électricité, elle a atteint l’année dernière et au début de 2024 des niveaux jamais connus auparavant, avec des coupures de courant allant jusqu’à 12 heures par jours pour éviter l’effondrement total du réseau électrique national.

Cette situation a eu un impact désastreux sur l’activité économique, entraînant des perturbations dans la chaîne d’approvisionnement, des retards de production et des coûts liés à la mise en place de générateurs pour pallier la pénurie de l’électricité. Selon la Banque centrale, cette situation a réduit de 2% le PIB national en 2023.

Ainsi, trente ans après la fin de l’apartheid, un profond sentiment de désillusion s’est installé au sein de la société sud-africaine. De larges pans de la population estiment être laissés pour compte par les dirigeants du parti au pouvoir, dont certains ont été impliqués dans des affaires de corruption, de malversation et de blanchiment d’argent.

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