vendredi 26 avril 2024

La Suisse entre ouverture sur l’Europe et rejet de l’UE

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L’évolution du contexte géopolitique et économique du continent européen depuis le début de la guerre en Ukraine n’a pas pesé sur l’orientation politique générale de la Suisse, qui refuse toujours de rejoindre l’Union Européenne (UE), préférant développer ses relations bilatérales avec les États membres.

Alors que les négociations se poursuivent entre la confédération helvétique et l’UE sur l’avenir de leurs relations, le dernier rapport de Berne sur la question ne laisse présager aucune concession sur l’identité singulière de la Suisse, qui entend vivre son appartenance à l’Europe à sa manière : Avec les pays du continent dans un cadre bilatéral et loin de l’UE et de son multilatéralisme.

En mai 2021, le Conseil fédéral suisse avait rompu les discussions concernant l’accord-cadre avec l’UE, préférant la voie du bilatéralisme. Ce qui n’a pas manqué de déplaire à Bruxelles dont la première réaction a été de retirer Berne du programme Horizon Europe. En dépit de la reprise des négociations, le chemin semble encore long vers un accord entre les deux parties.

Les appels à accélérer l’intégration suisse, en phase avec les nouveaux défis dans les domaines sécuritaire et énergétique, n’a pas conduit à une percée réelle, alors qu’à l’issue de l’examen du projet de rapport « État actuel des relations Suisse–UE », le Conseil arrive à la conclusion que la voie bilatérale reste la solution la plus avantageuse pour la Suisse.

Le rapport a donc été adopté en décembre, sous réserve des résultats de la consultation des commissions de politique extérieure des deux Chambres.

« La Suisse a un intérêt essentiel à une relation stable et bien structurée avec l’UE », a affirmé le Président de la Confédération, Alain Berset, dans un entretien accordé au portail Swissinfo.

« Depuis quelques mois, nous menons des entretiens exploratoires avec Bruxelles, qui montrent certains progrès. Le Conseil fédéral va devoir maintenant faire un bilan de ces discussions et voir comment il convient de poursuivre les discussions », a-t-il ajouté dans une déclaration qui semble confirmer la position helvétique traditionnelle.

Le pays a certes entamé une nouvelle ère en 2023 dans son positionnement géostratégique, en occupant pour la première fois de son histoire un siège de membre non permanent au Conseil de sécurité des Nations unies. Mais il ne peut y avoir de parallèle entre l’implication onusienne de la Confédération et son intégration dans les institutions européennes.

La Suisse tient aux marges de manœuvre que lui offre son positionnement en dehors de l’UE, tant sur les plans économique et politique que culturel. De plus, l’adhésion à l’UE n’implique pas uniquement un travail coordonné au niveau économique, diplomatique, politique et culturel, mais aussi une politique sécuritaire et de défense commune, ce qui ne correspond pas au mode de vie helvétique, bien qu’il soit en évolution constante.

Le projet de rapport « État actuel des relations Suisse–UE » dresse un état des lieux des relations bilatérales de la Suisse avec l’UE et des discussions exploratoires menées avec l’UE. Le Conseil fédéral reconnaît dans ce rapport le rôle essentiel joué par l’UE en tant qu’acteur global et l’importance pour la Suisse du marché intérieur de l’UE et de ses différents programmes de coopération.

L’UE est le principal partenaire commercial de la Suisse, qui est quant à elle le quatrième partenaire commercial de l’UE. La Suisse et l’UE partagent les mêmes valeurs fondamentales. Le Conseil fédéral relève que la politique européenne est une politique de défense des intérêts, et que les intérêts de la Suisse commencent en Europe et avec l’Europe. Dans un monde en proie à des crises multiples, il est encore plus important d’assurer des relations stables entre la Suisse et l’UE. C’est là une garantie de prospérité et de stabilité pour les deux parties, affirme le rapport.

Il dresse un bilan intermédiaire de la voie bilatérale et évalue les options actuelles de la Suisse en matière de politique européenne sur la base de quatre critères : accès au marché unique, possibilités de coopération, marge de manœuvre politique et faisabilité en matière de politique extérieure. Le Conseil fédéral arrive à la conclusion que la voie bilatérale reste la meilleure solution pour la Suisse.

Il ne fait pas de doute que certains secteurs vitaux suisses sont lésés par le positionnement en dehors de l’UE, puisqu’ils ne profitent pas de programmes de développement et de coopération d’ampleur, comme c’est le cas pour la promotion de la recherche scientifique. Mais l’élite suisse est au fait des dommages collatéraux du choix de l’indépendance, qui, à ce jour, a permis au pays d’avoir une position de choix dans le concert des nations.

La voie bilatérale avec les pays d’Europe est toujours le premier choix des Suisses, mais ce choix devra faire face à d’importants défis occasionnés par la volatilité du contexte régional et international actuel.

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