vendredi 10 mai 2024

Mexique : six morts dans une attaque à l’explosif « sans précédent »

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Un nouveau degré dans la narcoviolence au Mexique? Au moins six personnes sont mortes et 14 autres ont été blessées dans une attaque à l’explosif « sans précédent » contre des forces de sécurité mardi près de Guadalajara.

Deux civils ont également été victimes de l’explosion mardi soir de plusieurs engins activés au passage d’un convoi des forces de sécurité, ont détaillé les autorités, qui évoquent la piste du guet-apens.

C’est quelque chose que nous n’avions jamais vu auparavant ici, a déclaré mercredi le gouverneur du Jalisco, Enrique Alfaro, pourtant à la tête d’un des États les plus violents de la fédération (1095 homicides et 750 disparitions rien que depuis le début de l’année).

Le gouverneur a dénoncé un acte de terreur brutale qui s’apparente à un défi à l’État mexicain dans son ensemble.

Dans ce pays habitué à la violence, les attaques à l’explosif restent relativement rares.

Le gouverneur a pointé la responsabilité de la délinquance organisée, sans mentionner spécifiquement le cartel Jalisco Nouvelle Génération (CJNG), un des deux plus redoutables du Mexique.

Trois policiers figurent parmi les victimes, a indiqué le gouverneur. L’attaque a également tué deux civils, d’après le procureur cité par le journal Milenio.

Les assaillants ont utilisé sept engins explosifs improvisés, d’après le gouverneur, selon qui l’attaque ciblait le personnel du parquet de l’État [du Jalisco] et de la police municipale de Tlajomulco.

Un piège

Dans cette commune proche de Guadalajara, quelque 200 corps ont été retrouvés cette année dans des fosses communes. Il s’agit de victimes présumées de la guerre que se livrent les cartels.

Les forces de sécurité visées par l’attaque à l’explosif se rendaient d’ailleurs mardi soir sur les lieux de la possible découverte d’une fosse commune après un appel anonyme au représentant d’un des collectifs de civils qui cherchent les personnes disparues.

D’après des informations de l’antenne locale de la chaîne de télévision Televisa, l’explosion est survenue près d’un véhicule qui transportait les policiers.

C’était un piège destiné à obtenir la présence de nos policiers, selon le gouverneur.

Nous n’avons jamais reçu cet appel, a déclaré à la presse Indira Navarro, du collectif des mères chercheuses du Jalisco.

Le Jalisco est l’État mexicain (il y en a 32 au total) qui compte le plus grand nombre de personnes portées disparues (quelque 15 000 sur un total de 111 203 enregistrées depuis 1962).

En juin, un agent de la Garde nationale est mort et d’autres ont été blessés dans l’explosion d’une voiture piégée dans l’État de Guanajuato.

Dimanche dernier, dans l’État voisin du Michoacán, une personne a été blessée dans une attaque à l’explosif par drone dans le village d’Apatzingan.

L’objectif est d’affaiblir la force de frappe des rivaux d’autres cartels, ainsi que des forces de sécurité, et de provoquer la terreur parmi la population civile, résume le consultant en sécurité David Saucedo, qui parle à l’AFP de narcoterrorisme.

Il évoque le narcoterrorisme qui a sévi en Colombie à l’époque du capo Pablo Escobar, dans les années 90.

Ce n’est pas du narcoterrorisme. Ce sont des organisations criminelles qui utilisent les techniques du terrorisme. Il n’y a aucune revendication sociale, idélogique, ethnique ou séparatiste, nuance Javier Oliva, spécialiste des questions de sécurité à l’Université nationale autonome du Mexique (Unam).

Les forces de l’État ont également été défiées lundi et mardi dans le Guerrero, où 10 policiers et trois fonctionnaires ont été les otages de manifestants infiltrés par le crime organisé, d’après les autorités.

Ces 13 personnes ont finalement été relâchées mardi après des négociations entre l’État fédéral et les manifestants, qui avaient aussi défoncé la porte du palais du gouverneur du Guerrero avec un véhicule blindé de la police et bloqué une autoroute.

Des milliers de disparus depuis 2006

Le Mexique a enregistré quelque 350 000 assassinats tandis que des dizaines de milliers de personnes ont été portées disparues depuis 2006, année du déclenchement d’une offensive militaire contre le crime organisé.

Le CJNG est accusé d’avoir abattu un hélicoptère avec un lance-roquette en 2015, provoquant la mort de six officiels de l’État du Jalisco.

Le chef du CJNGNemesio Oseguera El Mencho, est recherché par les États-Unis, qui offrent 10 millions de dollars pour sa capture.

Le président mexicain, Andres Manuel Lopez Obrador, est accusé d’avoir prêché la conciliation avec les cartels, que des républicains américains voudraient classer dans la liste des organisations terroristes.

La paix est le fruit de la justice, non de mesures coercitives, a répété mercredi Lopez Obrador, qui avait résumé sa politique par la formule (Abrazos, no balazosdes accolades, pas des fusillades).

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