À une majorité de six juges sur neuf, la haute juridiction du pays a rejeté la théorie dite des législateurs d’État indépendants
, défendue par des parlementaires républicains de Caroline du Nord.
Selon eux, la Constitution place les règles des élections fédérales entre les mains des parlementaires des États et de personne d’autre
à ce niveau.
Dans les faits, la Constitution confie aux élus de chaque État la tâche de fixer l’époque, le lieu et la procédure
des scrutins, mais leurs lois demeurent soumises au contrôle des tribunaux locaux.
Dans son arrêt, la Cour suprême a tranché que la Constitution ne protège pas les parlements locaux du contrôle judiciaire ordinaire par les tribunaux de leur État
.
Bien que la clause électorale n’exempte pas les législatures des États des contraintes ordinaires imposées par les lois locales, les tribunaux fédéraux ne doivent pas abandonner leur devoir d’exercer un contrôle juridictionnel
, a écrit le juge en chef de la Cour suprême des États-Unis, John Roberts.
Une théorie « de l’extrême droite »
Cette décision a rapidement été saluée par les démocrates, qui ont d’ores et déjà dénoncé une tentative de la part des alliés conservateurs de l’ancien président Donald Trump visant à fragiliser la démocratie américaine.
Dans un communiqué, l’ancien président Barack Obama a salué le rejet par la Cour suprême de cette théorie de l’extrême droite colportée par des négationnistes et des extrémistes qui cherchent à saper notre démocratie
.
Concrètement, le dossier découle du recensement de 2020 qui a enregistré une hausse de la population en Caroline du Nord. En conséquence, l’État avait gagné un siège supplémentaire à la Chambre des représentants et ses parlementaires avaient redessiné les contours des circonscriptions.
Leur carte avait toutefois été invalidée par la Cour suprême de l’État, qui a jugé qu’elle favorise le Parti républicain en regroupant les électeurs démocrates dans certaines circonscriptions pour diluer leur vote ailleurs. Une seconde électorale carte n’ayant pas semblé plus équitable, la haute juridiction locale avait nommé un expert indépendant pour s’en charger.
Les législateurs locaux s’étaient alors tournés vers la Cour suprême des États-Unis, en reprochant au pouvoir judiciaire de l’État d’avoir usurpé leur rôle.
La haute juridiction avait refusé d’intervenir en urgence et la carte de l’expert a finalement servi aux élections de mi-mandat, en novembre dernier, permettant d’élire sept représentants de chaque parti.
Des précédents
Lors de ce scrutin, l’équilibre a changé à la Cour suprême de la Caroline du Nord, où les magistrats conservateurs sont désormais nettement majoritaires. Dans la foulée, ils ont estimé qu’ils n’étaient pas compétents pour invalider le découpage des circonscriptions.
Il est donc possible que les parlementaires locaux redessinent une nouvelle carte avant les élections de 2024. La décision de la Cour suprême n’aurait alors aucun impact concret.
Les tribunaux ont rejeté la théorie des législateurs d’État indépendants
à de nombreuses reprises au fil des ans. Par exemple, en 1916, la Cour suprême a jugé que les citoyens de l’Ohio avaient le droit d’opposer leur veto aux lois électorales par le biais de référendums populaires.
Près d’un siècle plus tard, la Cour suprême a jugé que la commission indépendante de redécoupage des circonscriptions électorales de l’Arizona, adoptée par une initiative populaire, était constitutionnelle.