dimanche 8 septembre 2024

Exoplanètes : le mystère des sub-Neptunes perdues est peut-être résolu

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Il existe un mystère connu des astrophysiciens travaillant à comprendre le monde des exoplanètes que l’on appelle du nom ésotérique « rift subneptunien ». Il porte sur une curieuse sous-représentation des exoplanètes d’environ deux fois la taille de la Terre. Sur la base de simulations informatiques, une équipe de l’Institut Max-Planck d’astronomie (MPIA) et des universités de Genève (Unige) et Berne (Unibe) pense avoir retrouvé ces sous-Neptunes perdues en faisant intervenir des migrations planétaires et des planètes-océans.

Sur le site Encyclopédie des systèmes exoplanétaires, on peut voir que le 14 février 2024 la noosphère a identifié 5 632 exoplanètes dans la Voie lactée. Des milliers d’entre elles étaient déjà connues depuis un certain temps et bien évidemment les  avaient commencé à faire des statistiques pour en tirer des informations sur la formation et l’évolution des systèmes planétaires dans notre Galaxie. Une telle entreprise peut nous donner des indications précieuses sur la formation du Système solaire et aussi à quel point celui-ci est singulier ou ordinaire dans la Voie lactée.

À notre connaissance, à moins qu’elle ne soit sur une orbite très éloignée du  ou qu’elle ait été avalée par lui au tout début de l’histoire du Système solaire, il ne s’est pas formé de  ou de sous- dans celui-ci.

   Des super-Terres, des sous-Neptunes et des mini-Neptunes

En général, on définit une super-Terre par sa  en disant qu’il s’agit d’une exoplanète ayant une masse comprise entre celle de la Terre et celle d’une  dont la masse serait toutefois limitée à 10 fois celle de notre Planète bleue, avec une limite supérieure de dix fois la masse de la Terre (les géantes de glace  et Neptune contiennent respectivement 14,5 et 17 fois celle de la Terre). Certains auteurs tiennent à préciser qu’il doit s’agir aussi de planètes essentiellement rocheuses mais, généralement, on se limite tout de même à la masse et pas à la composition.

Dans le cas des sous-Neptunes, c’est le rayon qui compte généralement et il doit être plus petit que celui de Neptune, même si elle peut avoir une masse plus grande, ou à une planète avec une masse plus petite que Neptune, même si elle peut avoir un rayon plus grand avec notamment une  dilatée car surchauffée par sa proximité à son  hôte.

Attention toutefois, il faut distinguer mini-Neptunes et sous-Neptune. Une mini-Neptune est une exoplanète moins massive que Neptune mais qui doit lui ressembler en ayant une épaisse atmosphère d’ et d’, entourant un cœur constitué de glace, de roches ou même avec un océan , qu’il soit constitué d’eau,  ou un mélange des deux ou des substances volatiles plus lourdes.

   Un « rift subneptunien » 

Or, « il y a six ans, une nouvelle analyse des données du télescope spatial Kepler a révélé une pénurie d’exoplanètes d’une taille autour de deux rayons terrestres », explique dans un communiqué de l’Institut Max- d’astronomie (MPIA) Remo Burn, chercheur sur les exoplanètes au MPIA à Heidelberg. Ce creux est bien visible dans la courbe de distribution des rayons des exoplanètes en unité de rayon terrestre que l’on voit sur le schéma ci-dessus. Il est parfois appelé «  subneptunien ».

Des explications avaient été suggérées, soutenues parfois par des observations mais les scénarios proposés étaient sujets à débat et manquaient de fondations . Il semble que cela vient de changer significativement suite à des  menées par des  allemands et suisses qui ont publié un article à ce sujet dans Nature Astronomy et dont on peut trouver une version en libre accès sur arXiv. Remo Burn est l’auteur principal de l’article rapportant les résultats présentés dans cet article.

« En fait, nous – comme d’autres groupes de recherche – avions prédit, sur la base de nos calculs, avant même cette observation, qu’un tel écart devait exister », explique dans le même communiqué le coauteur Christoph Mordasini, membre du Pôle national de compétence en recherche (PRN) PlanèteS et qui dirige la Division de recherche spatiale et de sciences planétaires de l’université de Berne.

Le scénario de base considéré depuis un moment déjà pour expliquer les observations du défunt chasseur d’exoplanètes Kepler fait intervenir des migrations planétaires avec des exoplanètes qui, comme dans le cas des fameuses , se sont formées au-delà de la limite où des glaces peuvent exister à distance d’une étoile entourée d’un  et qui ensuite, en raison des perturbations gravitationnelles de la mécanique céleste, ont été amenées à se rapprocher de leurs soleils.

On pouvait alors imaginer que les sous-Neptunes manquantes avaient perdu une grande partie de leur atmosphère, et même des couches de glaces internes pour finir par se transformer en super-Terre en raison du chauffage et du souffle du rayonnement des étoiles centrales.  De fait, on a découvert des exoplanètes s’évaporant précisément en raison de leur proximité et donc vraisemblablement après avoir migré.

Sauf que l’on sait que les phénomènes de migrations planétaires peuvent avoir lieu dans les deux sens et que les mécanismes d’évaporation des atmosphères d’hydrogène et d’hélium ou des cœurs glacés de sous-Neptunes ne sont pas simples. Pouvait-on vraiment retrouver la distribution en taille des exoplanètes déduites des observations de Kepler ?

   Des simulations avec des planètes-océans qui migrent

Les nouvelles simulations conduites ont bénéficié de progrès dans la  des phénomènes d’évaporation en relation avec les migrations. « Les propriétés de l’eau aux  et aux températures présentes à l’intérieur des planètes et de leur atmosphère étaient au cœur de cette étude », explique Burn.

Toujours dans le communiqué du MPIA, sa collègue Julia Venturini de l’université de Genève explique : « Sur la base des simulations que nous avons déjà publiées en 2020, les derniers résultats indiquent et confirment que l’évolution des sous-Neptunes après leur naissance contribue de manière significative à la vallée du rayon observée. » L’astrophysicienne est membre de la collaboration PlanetS, mentionnée ci-dessus, et elle avait dirigé l’étude de 2020.

Les nouvelles simulations reproduisent plutôt bien la courbe avec le « rift subneptunien », même si quelques écarts existent encore.

L’explication plus détaillée avancée est donc qu’une partie des sous-Neptunes formées à grandes distances ont migré et sous l’effet de la  se sont transformées en planète-océan avec une atmosphère de vapeur d’eau dilatée qui leur donne un rayon apparent plus élevé que leur rayon initial. Ces planètes-océans chaudes contribuent donc au pic de sous-Neptunes à droite du rift subneptunien dans la distribution de taille.

Inversement, des sous-Neptunes qui ont migré se sont bien transformées en super-Terre et ont rétréci en donnant une mince atmosphère entourant un cœur rocheux important d’où cette fois-ci un pic à gauche du rift subneptunien.

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