samedi 20 avril 2024

Le roman « Une reine » de Judith Elmaleh: une saga familiale en hommage à la mémoire judéo-marocaine

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Le public de Rabat avait rendez-vous, lundi soir, avec l’écrivaine Judith Elmaleh pour la présentation de son premier roman « Une reine », un ouvrage à cheval entre biographie et fiction, passé et présent.

Lors d’une rencontre littéraire organisée au siège de la Fondation Hassan II pour les Marocains résidant à l’étranger, la réalisatrice et scénariste maroco-française a longuement échangé avec l’assistance, composée d’intellectuels, artistes et membres de la communauté judéo-marocaine, sur les raisons l’ayant poussée à écrire son histoire de famille et les messages véhiculés par le roman.

Le roman, composé de 270 pages de format moyen et paru en 2022 aux éditions Robert Laffont, est le récit des vies et des destins intrinsèquement différents, mais qui finissent par s’entrecroiser de deux femmes juives marocaines appartenant à deux générations : l’une (Anna) est née en 1969, tandis que l’autre (Mimi, sa grand-mère) a vu le jour au Casablanca des années 1930.

Vivant à Paris une traversée du désert sur les plans familial et professionnel, Anna décide de retourner se ressourcer auprès de sa grand-mère dans son vieux domicile à l’ancien Mellah de Casablanca où le temps semble s’être figé depuis presque un siècle. Les émouvantes retrouvailles permettent la découverte d’un vieux secret de famille longtemps gardé par Mimi et qui va profondément marquer Anna et la pousser à se remettre en question. Au passage, l’auteure fait le récit de la « belle époque » quand les juifs marocains vivaient en parfaite harmonie avec leurs concitoyens musulmans, et quand leur attachement aux valeurs et aux us et coutumes hérités des ancêtres n’avait d’égal que leur amour et leur dévouement pour leur pays le Maroc.

« Il ne s’agit pas d’une biographie mais d’un roman parce qu’il comporte toute une partie fictive. Par exemple, ma rencontre avec ma grand-mère n’a pas eu lieu en réalité et je regrette profondément de ne pas avoir eu le réflexe de revenir la visiter chez-elle. J’ai dû fouiller, enquêter au sein de ma famille pour pouvoir planter le décor le plus fidèlement possible », affirme Judith Elmaleh.

En dressant le portrait de cette « grand-mère courage » qui a enduré un mariage forcé à 14 ans et un mari bigame mais qui a toujours su garder sa dignité, telle une reine, la journaliste et metteuse en scène dit vouloir « sauver de l’oubli » cette belle histoire de famille et transmettre à la nouvelle génération, déboussolée, les nobles valeurs qu’elle véhicule. « Une reine » se veut aussi un hommage « à ce Maroc du vivre-ensemble et à son intelligence sociale qui fait que malgré nos différences, on s’aime, on partage et on se raconte nos souvenirs communs », dit-elle.

Pour sa part, le journaliste Mohamed Ameskane, modérateur de la rencontre, s’est félicité du foisonnement, ces dernières années, des productions littéraires signées dans différentes langues par des auteurs juifs marocains vivant dans les quatre coins du globe, voyant là un « phénomène éditorial ».

Éloignés géographiquement et culturellement de leur pays d’origine, ces écrivains ont toujours le mal du bled, de la ville ou du patelin de leur enfance et ils tiennent à décrire, dans leurs œuvres, différentes facettes du patrimoine judéo-marocain comme la gastronomie, l’habillement, les traditions et les rituels, constate M. Ameskane, spécialiste du patrimoine juif marocain.

Née à Casablanca en 1969, Judith Elmaleh est scénariste, metteuse en scène et réalisatrice. Tôt, elle s’est passionnée par le monde du cinéma. En 2009, elle a mis en scène le spectacle « A la folie » de l’humoriste Ary Abittan. Elle a également assuré la direction artistique de plusieurs émissions de télévision en France. Judith Elmaleh a co-écrit avec Gad Elmaleh certains de ses one-man-shows, notamment « Papa est en Haut ». Elle a, par ailleurs, contribué à l’écriture de films internationaux.

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