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Face à la recrudescence des mouvements de grève ces derniers temps, dans des secteurs publics vitaux en particulier, la question de la promulgation d’une loi organique réglementant la grève a refait surface. Le gouvernement est à pied d’œuvre pour que ce projet voie le jour avant fin 2012, en vue d’instaurer un équilibre entre le droit de grève, le droit de travail et la préservation de l’intérêt général.
La loi organique réglementant la grève, en état de projet, devra résoudre l’équation qui consistera à trouver un équilibre entre le droit de grève, le droit de travail et la préservation de l’intérêt général. Cette équation reflète les divergences et les attentes des différents partenaires sociaux qui sont partagés entre acceptation, réserve, voire même le refus de ce projet tant attendu depuis 1962 et qui est soumis à un débat avec les centrales syndicales, les patrons d’entreprises pour l’examiner et formuler des propositions au gouvernement qui s’est dit, par la voix de son chef, fermement convaincu que la loi régissant la grève devrait voir le jour.
Une volonté affichée du gouvernement
Le gouvernement a annoncé, jeudi dernier, la création d’une commission ministérielle chargée d’examiner la question des grèves et les mesures nécessaires, y compris le projet de loi organique sur la grève, en vue d’élaborer une politique globale et complémentaire réglementant le droit de grève. Cette politique sera le fruit d’un dialogue avec les différents partenaires et en conformité avec les standards internationaux en matière d’exercice des libertés syndicales.
Le gouvernement tient à ce que cette loi voie le jour le plus tôt possible en raison de la multiplication des mouvements de grève au cours de ces derniers mois et leurs répercussions négatives sur les intérêts des citoyens, notamment dans les secteurs publics vitaux: santé, enseignement, justice et collectivités locales.
Le projet de loi organique ambitionne de développer une vision claire pour éviter les grèves anarchiques de sorte à préserver le droit de grève et le droit du travail conformément aux dispositions de la loi, a fait remarquer une source du ministère de l’Emploi et de la formation professionnelle.
UMT
Selon Mme Amale Aamri, membre du secrétariat national de l’Union Marocaine du Travail (UMT), l’Union est, depuis des années, contre le principe d’élaboration d’une loi organique qui réglemente le droit de grève et préfère plutôt le renforcement du dialogue, la modernisation des relations professionnelles et la conclusion de conventions collectives pour éviter les grèves, citant dans ce sens, l’exemple de la France qui ne dispose pas d’une loi organique sur la grève.
D’après Amale Aamri “Cette loi risque d’empêcher les employés, sous prétexte de réglementation, d’exercer le droit de grève garanti par la Constitution, plus particulièrement dans un contexte marqué par le non respect du code du travail et des lois sociales en général et la violation des droits des travailleurs. Nous sommes contre la réglementation autant que nous encourageons le dialogue et les conventions collectives pour se mettre d’accord sur des mesures devant prévenir les conflits collectifs, leur gestion et leur traitement avant de recourir à la grève.”
UNTM
En revanche, M. Abdellilah Halloutti, de l’Union Nationale du Travail au Maroc (UNMT), a affirmé, dans une déclaration similaire, que la position de l’Union est immuable quant à la nécessité de promulguer une loi régissant les grèves, faisant part de la disposition de l’UNMT à interagir avec le gouvernement dans ce domaine pour rationaliser les libertés syndicales et pour des luttes syndicales responsables.
Il a souligné de même que cette loi coïncide avec la mise en place d’une loi sur les syndicats, ce qui permettra de développer une vision claire et de protéger le champ syndical de certaines pratiques qui nuisent à ce droit, ajoutant: « on ne rejette pas la loi, mais il doit y avoir des concertations élargies entre le gouvernement et les syndicats et les autres acteurs concernés pour préserver les intérêts de toutes les parties ». Il est temps d’examiner le projet avec sérieux et responsabilité, de même que la loi sur les syndicats doit voir le jour, a-t-il dit.
CGEM
Pour ce qui est de l’avis des employeurs, la réglementation de la grève a été depuis toujours une revendication pressante. Ce texte doit voir le jour avant fin 2012 et refléter les résultats du dialogue, du consensus et des mesures de confiance préexistantes entre les différents partenaires sociaux, a indiqué le président de la commission emploi et relations sociales à la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM), M. Jamal Belahrash.
Rappelant que la Confédération avait signé avec les cinq syndicats les plus représentatifs des conventions de médiation sociale pour régler les conflits de travail et les prévenir, il a estimé, dans une déclaration à la MAP, que cette loi allait redonner confiance aux opérateurs marocains et étrangers et enverrait un signal fort aux investisseurs étrangers qui souhaitent s’installer au Maroc.
“La CGEM a soumis, jeudi dernier, au ministère de tutelle, ses propositions concernant ce projet de loi, notant que ces propositions portent notamment sur le préavis de grève, le droit au travail des non-grévistes, la liberté d’entreprise et la liberté syndicale et le service minimum dans les secteurs vitaux (santé, enseignement).” explique M. Belahrash
Le projet de loi sur la Grève :
Le projet de loi organique (51 articles) reconnaît le droit de grève garanti par la Constitution, préservant ainsi le droit des grévistes, la liberté du travail des non-grévistes et les droits des employeurs, en plus de mesures visant à assurer un service minimum en temps de grève, notamment dans le secteur public.
Le projet de loi, qui conditionne la validité d’une décision de grève par l’accord d’au moins 35% des salariés, fixe également le préavis précédent une grève à une durée de dix jours minimum.
L’employeur doit être informé du débrayage dix jours avant la date de la grève et ses motifs tout comme les autorités locales et les délégations du ministère de l’Emploi et de la Formation professionnelle.
L’OIT (Organisation Internationale du Travail) considère comme admissibles les principes suivants:
1) l’obligation de donner un préavis de grève.
2) l’obligation de recourir avant de déclencher la grève aux procédures de conciliation, de médiation ou d’arbitrage dans la mesure où il s’agit de procédures appropriées, impartiales et rapides, auxquelles les intéressés peuvent participer à toutes les étapes.
3) l’obligation d’avoir l’accord d’une certaine majorité de travailleurs pour déclencher la grève.
4) l’obligation de décider la grève au scrutin secret.
5) l’obligation de prendre les dispositions nécessaires pour l’observation des prescriptions de sécurité et la prévention des accidents.
6) l’obligation d’assurer un service minimum dans certains cas.
7) l’obligation de respecter la liberté du travail des non-grévistes.