Laila Bouzid*
Un climat très pollué règne dans le royaume depuis quelques jours à cause de la polémique engendrée par l’affaire des déchets en provenance d’Italie. En effet, cet emballement est amplifié de plus en plus par la communauté des adeptes des réseaux sociaux qui pensent que cet acte irréfléchi ne peut que représenter une véritable honte pour notre pays, prochainement organisateur de la plus grande conférence mondiale concernant l’environnement et les problèmes climatiques, la COP 22.
L’opinion publique est très agitée en ces derniers jours, entre ceux qui estiment que ces 2500 tonnes de déchets sont nocifs et très dangereux pour la santé des marocains et ceux qui prétendent que le Maroc en a assez suffisamment de déchets, pas besoin de rajouter ceux des autres pays occidentaus, plusieurs questions taraudent les esprits des marocains et les réponses ne sont pas encore claires ni convaincantes. Les parties concernées par ce problème ont fait des déclarations suite aux réclamations du peuple. Dans ce cadre, le gouvernement a chargé le ministère de l’intérieur de mener une enquête sur cette affaire et a décidé d’interdire toute éventuelle importation de déchets jusqu’à ce que l’enquête soit terminée.
L’embarquement de ces grandes quantités de déchets en plastique n’est pas certes une opération récente, les cimentiers du Maroc importent depuis plus de dix ans, et plus précisément depuis le 16 juillet 2003, des dizaines de milliers de tonnes de déchets en provenance des pays européens pour alimenter leurs fours, ce qui a permis au secteur du ciment au Maroc de réaliser des gains époustouflants et de diminuer les coûts élevés de production des générateurs d’énergie, notant bien que le prix du ciment a doublé entre les années 2004 et 2016. Cette charge de déchets pneumatiques et plastiques embarquée à Jorf lasfar le 24 juin dernier a déclenché une redoutable explosion au sein de la société civile mais aussi de la part de quelques responsables politiques de l’opposition tels que Nabila Mounib, la secrétaire générale du PSU, qui a affirmé que « ces déchets toxiques » vont affecter la santé des citoyens et que «le Maroc est devenu une poubelle de l’Europe» ; Mohamed Ziane, dirigeant du parti libéral et ex-ministre des droits de l’Homme, s’est lui aussi manifesté en portant une plainte contre le gouvernement pour «importation de déchets toxiques».
Bombardée par les accusations des citoyens, d’un côté, et des parties politiques de l’autre côté, la ministre déléguée de l’environnement, Hakima El Haite a déclaré récemment que ces déchets ne sont dans aucun cas dangereux ni pour les l’Homme ni pour l’environnement, et qu’ils représentent en effet des matières qualifiées pour extraire des carburants alternatifs de l’énergie. Le ministère de l’environnement a ajouté que l’importation de cette charge de déchets est conforme avec les normes mondialement connus et sous la réglementation en vigueur, le contrôle et le suivi des autorités compétentes du pays d’origine et celui d’accueil.
La convention de Bâle qui régit la circulation de déchets interdit l’exportation de produits dangereux vers des pays hors-OCDE comme le Maroc. « Les autres types de déchets sont en revanche autorisés. Selon les chiffres du ministère français de l’Environnement, plus de 60 000 tonnes de déchets « non dangereux» ont été notifiées en France en 2012 à destination du Maroc, ce qui fait du royaume le premier destinataire hors-UE de ces déchets français. Il s’agit principalement de pneus usagés et découpés, qui servent à alimenter les fours des cimenteries. Le Maroc en a importé au total plus de 730 000 tonnes entre 2007 et 2015 selon les données de l’Office des changes, provenant en majorité de France, d’Italie et d’Espagne. Un pic a été atteint l’année dernière avec l’importation de près de 140 000 tonnes de débris de pneus», selon une source fiable.
*Journaliste stagiaire